L’hôtel de la première base

 

 

« Bon, allez, espèce de trou du cul, réveille-toi. » J’ai entendu une voix m’entrer avec un crissement dans les oreilles comme quand quelqu’un fait exprès de marcher sur les lunettes d’une vieille dame. « Tu l’as eu ton somme antirides ! Réveille-toi maintenant ! C’est pas un hôtel ici ! C’est une équipe de base-ball ! » a poursuivi la voix crissante.

J’avais l’impression d’avoir reçu un coffre-fort sur la tête.

J’ai ouvert les yeux et j’ai vu l’entraîneur et Sam, au-dessus de moi, qui me regardaient. L’entraîneur avait vraiment l’air fumasse. Sam avait un sourire de jeune chiot aux lèvres, toutes dents de devant dehors. J’étais allongé dans l’herbe à côté de la première base.

L’équipe était en train de s’entraîner à la batte. Les joueurs n’arrêtaient pas de jeter des coups d’œil dans ma direction et de faire des astuces. Tout le monde avait l’air de bien s’amuser sauf l’entraîneur et moi.

« Je savais bien qu’t’étais pas joueur de base-ball, dit-il. T’as pas la tête d’un joueur de base-ball. J’suis même pas sûr qu’t’aies vu une balle de base-ball de ta vie.

— Qu’est-ce qui s’est passé ? j’ai demandé.

— Ecoute-moi un peu ça, Sam, dit l’entraîneur. T’as entendu ça ? Ce p’tit con me demande ce qui s’est passé. Et toi, tu crois qu’il s’est passé quoi, eh, connard ? Réfléchis cinq minutes : imagine ce qui a bien pu se passer, et dis-moi un peu ce que tu crois qu’il s’est passé. Hein, qu’est-ce qui a bien pu se passer ? Et puis il s’est remis à hurler : T’en as pris une dans la gueule ! T’étais là, sans bouger, comme une espèce de demeuré et tu l’as prise dans la gueule ! T’as même pas bougé ! J’crois qu’t’as même pas vu la balle ! T’es resté là, planté, comme ça, on aurait dit qu’t’attendais l’autobus ! »

Alors il s’est penché, m’a attrapé par le col, et il a commencé à me faire traverser la pelouse en me traînant sur l’herbe jusqu’à la rue.

« Hé, arrêtez !, j’ai fait. Arrêtez ! Ça fait vachement mal à la tête. Qu’est-ce que vous fichez ? »

Mes paroles n’ont eu aucun effet sur lui. Il a continué à me traîner dans l’herbe. Il m’a laissé allongé sur le trottoir. Je suis resté allongé là un bon moment et, pour la première fois, je me suis dit qu’après tout je n’étais peut-être pas fait pour devenir joueur de base-ball professionnel. Et puis alors j’ai pensé au rêve de Babylone que j’avais fait, et à quel point ç’avait été agréable.

Babylone... Quelle chouette endroit.

C’est comme ça que tout a commencé.

Depuis, je n’ai pas arrêté d’y retourner.

Un Privé à Babylone
titlepage.xhtml
UN PRIVE A BABYLONE_split_000.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_001.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_002.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_003.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_004.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_005.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_006.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_007.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_008.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_009.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_010.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_011.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_012.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_013.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_014.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_015.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_016.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_017.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_018.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_019.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_020.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_021.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_022.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_023.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_024.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_025.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_026.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_027.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_028.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_029.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_030.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_031.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_032.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_033.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_034.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_035.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_036.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_037.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_038.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_039.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_040.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_041.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_042.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_043.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_044.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_045.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_046.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_047.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_048.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_049.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_050.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_051.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_052.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_053.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_054.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_055.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_056.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_057.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_058.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_059.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_060.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_061.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_062.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_063.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_064.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_065.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_066.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_067.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_068.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_069.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_070.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_071.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_072.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_073.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_074.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_075.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_076.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_077.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_078.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_079.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_080.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_081.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_082.htm
UN PRIVE A BABYLONE_split_083.htm